mardi 29 octobre 2013

La docile marche du monde


Photographie de Virginie Zilbermann

La peau est froide. L'homme
tangue.
Il ne va pas tarder à éloigner sa main
de son corps pâle, car
son visage est glacial comme un flocon de neige
ses chairs grelottent de part ses pulls enfilés les uns sur les autres
et, c'est comme s'il avait oublié
de s'amincir
afin 
de parfaire à ceux qui peuplent son monde.
Sa mère lui avait dit :
Il ne faut pas superposer les pulls-over.
Tu vas finir par attraper 
froid 
au lieu du contraire.
Tes chairs contre ces monceaux de laine. Ce n'est pas
respectable.
Lorsqu'il était petit,
sa mère lui avait dit. Sa mère ne dit 
plus.
Rien.
Morte. A présent. Dans sa tombe.
Enterrée, 
parmi les vers et les cafards
Rongée des asticots et des petites bêtes.
Transformée en terre,
décomposée
afin d'aller rejoindre 
les salades 
et
les tomates,
commençant leur vie 
dans le terreau frais des jours.
Un bout de maman dans la terre.
Un bout de terre 
dans le vert.
Maman 
qui erre dans mon estomac 
grand comme l'univers.
J'ai faim. 
Il faut que je mange.
La carotte 
croque contre
ses dents.
Sa mère n'est plus.
Aucune parole alors
suspendue dans l'air.
Il ne faut pas superposer les pulls-over.
Les mots sont morts.
Les mots 
sont morts
dans la tombe
et il n'a 
rien 
pour lui dicter sa vie.
Seulement le reste.
Les pensées et les convictions
qui permettent d'avancer ses pas 
sur le sol mouillé d'antiquité.
A force de trop de vie, 
plus rien d'original.
Les copies, de nombreuses fois.
Salies par les
savons
passés et repassés sur l’éphémère
d'êtres semblables à lui.
Car c'est inévitable.
Une vie, 
c'est comme partout :
ça commence par les pleurs
et puis après on meurt.

jeudi 24 octobre 2013

Puisqu'il

As usual Art Print
Photographie de Daniel Vasilescu


 Les choses étranges
Transpercent les rêves comme s'ils n'avaient pas fini d'évoluer
De prendre leur allure dans les têtes emmitouflées de leurs cheveux passés par le temps
Il suffit de prendre appuie sur la vie
Afin de ne pas laisser les illusions s'évaporer
Alors ensuite
Ne pas briser les larmes sur le plancher des morts
Laisser couler l'humide sur nos joues rondes
Absorber les songes 
Et écrire ensuite
Afin de vider le surplus de graisse
Les abcès 
Et le dedans trop profond.


Entière, l'ombre demeure.